Le rapport Veca
Dernière édition le 2 juin 2021 à 12:42 - Relecture par Anne Smadja , correction par Claire Guérou , coordonné par Cypriane El-Chami
En bref
Au cours d’une enquête menée sur le sujet des agroglyphes (aussi appelés cercles de culture ou crop circles), Journalistes Solidaires a pu interviewer l’un des spécialistes sceptiques du phénomène, Gilles Munsch. Cet enseignant vosgien est l’auteur d’un rapport demeuré célèbre, le rapport Veca (Voyage d’étude des cercles anglais) qui formalise une méthodologie d’étude des cercles de culture.
Rédigé au milieu des années 1990 et diffusé sur le site du Geipan (Groupe d’étude et d’informations sur les phénomènes aérospatiaux non identifiés) en 2008, le rapport Veca de Gilles Munsch et son équipe amène pour la première fois un éclairage scientifique sur ce phénomène des crop circles, avec quatre voyages sur le terrain entre 1989 et 1992. Leur hypothèse de départ : les crop circles sont l'œuvre d'une ou de plusieurs équipes, d'au moins deux personnes chacune, qui agissent de concert ou indépendamment, généralement de nuit et avec des moyens logistiques réduits.
Avant de partir en Angleterre étudier des crop circles, l’équipe a mis au défi un truquiste de télévision, Pierre Bel, de créer un crop circle plus complexe que ceux déjà existants. «Il devait le réaliser en moins de deux heures, chose qu’il a faite. Cette expérience nous a montré que le plus complexe des crop circles était faisable en moins de deux heures par un seul homme, pour peu qu’il y ait une préparation et une réflexion en amont», raconte Gilles Munsch.
Des principes communs
Au fur et à mesure des voyages et des crop circles observés minutieusement, l'équipe de Veca établit une logique dans la construction de ces motifs et identifie des indices communs à tous les cercles. Ils définissent alors huit principes censés régir la conception humaine d’un crop circle.
Suivant ces principes, notamment celui de limitation, Gilles Munsch estime que, pour un cercle de culture comme celui de Milk Hill, «il faut du monde et du temps. Soit ça a été fait sur plusieurs nuits, soit il y a une vraie équipe, ce n’est plus 3-4 personnes». Pour le spécialiste, le principe de faillibilité est également primordial dans la construction de l’hypothèse humaine. Réaliser ce genre de motif, au milieu d’un champ, en pleine nuit, avec des imprévus, conduit forcément à des erreurs. «Malgré toute la réflexion préalable, la méthodologie décidée en amont, il y a des erreurs qui persistent», signale Gilles Munsch. «On a donc cherché des défauts», révélateurs, pour lui, de la nature manufacturée des crop circles : «Pourquoi une super technologie qui viendrait du ciel serait-elle gênée par une ligne de tracteur ? Pourquoi y aurait-il des erreurs de mesure ? Pourquoi les cercles ne seraient-ils pas parfaitement ronds ? La présence de ces défauts trahit pour moi la main humaine», conclut-il.
Ce qui montre également l’intervention humaine dans la conception de ces crop circles serait, selon Gilles Munsch, la réaction des crop makers. Comme cela a été dit au début de cet article, la presse a grandement contribué à la construction du mythe des crop circles, en relatant chaque nouvelle découverte. Et elle aurait également joué un rôle non négligeable dans leur évolution :
«Lorsque la presse a dit que dans tous les crop circles, le centre était à chaque fois sur une trimline [sillon présent dans un champ, laissé notamment par les agriculteurs avec leur tracteur, ndlr], pour une raison de facilité, les crop makers ont décidé de faire le centre ailleurs que sur une trimline, précise Gilles Munsch. Ils sont rentrés en plein champ pour démentir le fait que tous les centres étaient sur des trimlines. Sauf que pour aller en plein champ, ils écrasaient des épis, et faisaient un petit sentier. Et nous, on les a vu ces sentiers.»
Tous différents, tous semblables
Comme le détaille le rapport Veca, chaque crop circle est différent. Certains sont des cercles uniques, d’autres un assemblage de cercles. Certains sont réalisés en parallèle des trimlines et d’autres le sont à cheval sur ces lignes. Mais plusieurs points communs persistent aussi.
Parmi les signes récurrents, les petites lignes de traçage de cercles afin de se rendre au centre du crop circle. Le blé est alors couché dans un sens. Puis, lorsque les figures sont réalisées, il est couché dans l’autre sens. «Si c’est humain, c’est l’élément qu’il y a forcément. À chaque fois que Gilles Munsch est allé sur un crop circle, il a toujours vu ce genre de signe caractéristique», explique Christophe Michel, une des figures du scepticisme en France, créateur de la chaîne YouTube Hygiène mentale.
Pour lire l'enquête «Humains et extraterrestres : des photos de leurs empreintes ?», c'est par ici !