Les enfants vont-ils être dépistés massivement dans les écoles ?
Dernière édition le 29 mai 2020 à 13:58 - Relecture par Anne Smadja , correction par Nelly Pailleux , coordonné par Lina Fourneau

C'est faux
En bref
Depuis le 10 mai, un message WhatsApp prétend alerter sur un dépistage généralisé comme cheval de Troie d'une vaccination massive dans les écoles, dès la levée du confinement, le 11 mai. Une rumeur erronée, qui agite un spectre bien connu.
«À compter du 11 mai en France, sera imposé un dépistage massif dans toutes les écoles (700 000/semaine). Ne vous faites pas dépister, les tests ne sont pas fiables. Le lobbying est en train d'être activé dans toutes les entreprises et dans les médias pour une vaccination de masse», prévient le document.
Qui est l’auteur de ce texte ? Le document mentionne un certain Jean-Bernard Fourtillan, pharmacologue et professeur honoraire de chimie. Avec sa femme Marianne Fourtillan, il a cocréé le fonds Josefa, un fonds de dotation pour la recherche médicale. Sa position vis-à-vis des vaccins est claire : il est contre. En septembre 2019, il a déjà fait l’objet d'une enquête dirigée par l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) pour avoir mené un essai clinique sauvage sur près de 400 membres d'une communauté religieuse de Poitiers souffrant de la maladie d'Alzheimer et de Parkinson.
Contacté par Journalistes Solidaires, Jean-Bernard Fourtillan nie être l’auteur de la note sur le dépistage du coronavirus sans pour autant réfuter les théories véhiculées par le document. «Je suis tout à fait d’accord avec le contenu de cette alerte, qui n’est pas une théorie mais une réalité», explique ce dernier. Quelques jours plus tôt, il avait également expliqué au magazine Capital que «l’objectif de cette fausse pandémie est de vacciner la population mondiale avec un vaccin contre le Covid-19 extrêmement dangereux, fruit d’une manipulation génétique du Sars-CoV-2».
ATTENTION URGENT : Un professeur en pharmacologie, toxicologie, agrégé de chimie thérapeutique et de pharmacocinétique, prof. Jean-Bernard Fourtillan, nous révèle ce qui suit sur le futur vaccin #COVID19
— Sonia ن (@Katoenchemin) May 10, 2020
« Deux composants de ce futur vaccin sont classifiés secret défense... pic.twitter.com/MqFFfYu4eq
Alors, sa théorie est-elle crédible ? Des tests sont-ils prévus dans les écoles dans un but caché ?
Depuis le 11 mai, nulle mesure de la sorte n’a été prise au sein des établissements scolaires. Au micro de Journalistes Solidaires, le ministère de l'Éducation nationale répond qu'aucune campagne de dépistage virologique ou sérologique** généralisée** ne va être organisée après des enfants ou des enseignants, et juge d'ailleurs cette mesure «inutile».
«Toutes les personnes symptomatiques ou en contact avec des personnes présentant des **symptômes évocateurs du Covid-19 **seront testées à partir du 11 mai. Les élèves et personnels entrant dans ces catégories seront testés», nuance le ministère.
Aucun lien entre tests et vaccins
Par ailleurs, l’auteur du document semble faire un amalgame entre tests et vaccins. Pour rappel, les vaccins s’organisent autour de la «mémoire immunitaire». «Se faire vacciner, c’est introduire dans notre organisme un microbe rendu inoffensif. Si par la suite on est infecté par le vrai microbe, nos défenses immunitaires activées précédemment par les antigènes contenus dans le vaccin le reconnaissent plus rapidement et peuvent le neutraliser avant que la maladie ne se développe», explique le site Vaccinations info.
En ce qui concerne le Covid-19, aucun vaccin n’a été trouvé et sa fabrication nécessitera encore quelques mois supplémentaires. «Le virus est si nouveau et si différent qu’il nécessite un vaccin qui lui est propre», souligne de son côté l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Quant aux tests sérologiques, ils servent uniquement à la détection **des anticorps dans le sang **d'un patient, afin de savoir s'il a déjà contracté le virus. Les tests virologiques, dits PCR, ont quant à eux vocation à tester la présence du virus à l’instant T. Ainsi, quand l’auteur évoque un **«dépistage massif», **aussi erroné soit le terme, il n’aurait pas de corrélation avec une quelconque campagne de vaccination, laquelle ne dépend pas du dépistage.
Concernant les vaccins, l’auteur prévient : «Deux composants de ce futur vaccin sont classifiés secret défense !!!!! Un troisième et pas des moindres est le “squalène”.» Si aucun composant n’a été défini aujourd’hui, il est important de se pencher sur ces différents éléments.
Le lobbying est en train d'être activé dans toutes les entreprises et dans les merdias pour une vaccination de masse...
— Gaufrette (@hildega23490221) May 11, 2020
Deux composants de ce futur vaccin sont classifiés secret défense...
Un troisième et pas des moindres est le "squalène". #vaccination #vaccin #COVID19
Qu’est ce que le** squalène **? «C’est un constituant de certains adjuvants que l’on ajoute aux vaccins pour renforcer la réponse immunitaire. Substance que l’on trouve à l’état naturel chez les plantes, les animaux et l’homme, le squalène est synthétisé dans le foie et véhiculé par la circulation sanguine chez l’homme», définit l’OMS. S’il est expérimenté dans certains vaccins, notamment contre le paludisme, le squalène connaît quelques polémiques. En effet, il avait été mis en cause dans la survenue du «syndrome de la guerre du Golfe», ayant été administré aux vétérans qui auraient ensuite développé des anticorps anti-squalène. À cette période, **une partie du régiment avait été mise à l'arrêt. **
Mais dans un rapport publié en 2006, l’OMS répond : ces craintes étaient infondées, le squalène ne déclenche par la production d'anticorps pathologiques. Et d'ajouter qu'un suivi après commercialisation sera effectué pour repérer toute** «manifestation indésirable postvaccinale éventuelle».**
En réalité, la théorie principale de ce document reprend les arguments d’un premier texte viral contenant de fausses informations déjà décryptées par l’AFP. Ces fausses informations sont regroupées sous la forme de trois théories conspirationnistes.
La 5G, néfaste ?
Dans le document, l’auteur développe un premier raisonnement selon lequel le professeur Paul Héroux, directeur du programme de santé au travail également rattaché au département de chirurgie du Centre universitaire de santé McGil, aurait affirmé, avec 170 autres scientifiques, que les vaccins et la 5G affaiblissent le système immunitaire, ce qui réactive le virus. Si l’AFP a déjà expliqué que les rumeurs autour des vaccins étaient infondées, il est important de rappeler que les propos du professeur sur la 5G **ont été sortis de leur contexte **comme le montrent les deux entrevues suivantes.
Le 28 mai 2019, dans une interview menée par le journaliste Benoît Dutrizac, dans l'émission éponyme diffusée sur la radio québécoise QUB Radio et rapportée dans le Journal de Montréal, le professeur Héroux s'oppose fermement au déploiement de la 5G. Aujourd’hui, il fait notamment partie des 170 scientifiques signataires d'une lettre adressée à l’ONU appelant les gouvernements à freiner le déploiement de cette technologie concernant ses effets sur la santé et l'environnement.
Un peu moins d’un an plus tard, le 8 mai 2020, une nouvelle entrevue est menée par le même journaliste durant laquelle il l'interroge sur les possibles liens entre le coronavirus et la 5G. Ce à quoi il répond : «Je pense qu'il y a peut-être un lien, mais c'est un lien ténu et on n'a pas de preuves pour utiliser cet argument-là. Les arguments qu'on utilise pour écraser la 5G, ce sont les arguments de santé fondés sur ce qu'on sait des anciennes générations d'ondes électromagnétiques, sur le réchauffement climatique qui va empirer et sur l'invasion de la vie privée [...]». Plus tard dans l'interview, il précise la raison de l’existence de ce lien ténu qui repose principalement sur les études menées par le professeur Olle Johansson de l’institut Kalinska (basée en Suède). Celles-ci montreraient qu'une exposition à long terme aux radiations atténuerait la stimulation du système immunitaire. Mais le scientifique tient à rappeler que cet argument n'est pas assez recevable pour lier le coronavirus à la 5G.
Du côté de l’OMS, comme le rapporte l’article de l’AFP,** rien n'indique **pour l’instant que cette technologie représente un danger pour la santé.
«Covid-19», ça veut dire quoi ?
Toujours selon le texte conspirationniste, «Covid-19 veut dire Certificat Of Vaccination IDentity avec 19 1=a et 9=i pour AI=Intelligence Artificielle». Un nom qui serait «un** plan international** élaboré en janvier 2020 à Davos».
Toutefois, comme le démontre l’article de l’AFP cité précédemment, le virus n’a été reconnu officiellement par la Chine que le 9 janvier 2020. Un peu plus d’un mois plus tard, le 11 février 2020, «le Comité international de taxonomie des virus, un comité chargé de leur classification, a donné un nom à ce virus : SARS-CoV-2».
Un nom jugé trop compliqué à prononcer, que l’OMS a changé pour «Covid-19», pour «COronaVIrus Disease_»_, explique l'Institut Pasteur, ce qui signifie «maladie du coronavirus». Enfin, le nombre 19 sert à désigner l'année d'apparition de la maladie : 2019.
Un virus inactif passé 70 jours, vraiment ?
Le dernier argument concerne la durée d’activité du coronavirus. Selon le document, après 70 jours, le virus ne serait plus actif et donc ne circulerait plus. Or, même si cela fait plus de **deux mois et demi **que le coronavirus est apparu en France, il est toujours présent, comme l’explique l’AFP dans son enquête. En outre, le 17 mai dernier, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a évoqué l’identification de 25 nouveaux «clusters» dans l’hexagone confirmant la présence du virus. Le lendemain, dans un communiqué, la direction générale de la Santé prévenait :
«L’épidémie de Covid-19 **reste active et le virus circule **toujours en France. Nous devons donc rester prudents et respecter toutes les mesures barrières».
Ainsi, le document met en garde sur une vaccination massive pour un virus ne restant, à priori, actif que 70 jours. Mais même si le confinement a été levé, le virus circule toujours sur le territoire.
En résumé, aucun dépistage ni vaccination massif n'est organisé dans les établissements scolaires réouverts depuis la fin du confinement, le 11 mai. Les tests seront effectués en cas de suspicion de contact avec une personne atteinte par le Covid-19, d'après l'Éducation nationale. Mais aucun lien ne doit être fait avec la vaccination, qui n'existe pas à ce jour pour le SARS-CoV-2.
Fiche Enquête
La fiche ci-dessous résume le parcours et la méthodologie employés pendant notre enquête.
Information
Vérifiée et fausse
Première apparition sur le web
Non renseigné
Dernière modification de la fiche de l'enquête
4 mai 2021 à 16:52
Lieu de publication constaté
Actions entreprises par les journalistes
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Le document envoyé par Whatsapp indique qu'à partir du 11 mai, un dépistage massif va être lancé dans toutes les écoles, à raison de 700 000 tests par semaine.
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Le texte mélange test et vaccination. Selon le "pharmacien", deux composants du vaccins sont secrets. Le troisième s'appelle le "squalène".
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Il utilise la preuve déjà rencontrée, assez conspirationniste, qui montre que Covid-19 veut dire Certificat Of Vaccination IDentity avec 19 1=a et 9=i pour AI=Intelligence Artificielle (cf vérif AFP Factuel). Selon lui, c'est un plan international élaboré en janvier 2020 à Davos.
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Selon J-B Fourtillan, "le virus retrouvera vigueur avec les radiations électro-magnétiques". Il cite la parole d'un "expert" en Génie Civil, Paul Héroux. "Paul Héroux 15 ans en Génie-électrique et 27 ans de Sciences de la santé, le confirme ainsi que 170 confrères dans leurs nombreuses expériences. Ce qui réactive le virus, c’est un terrain immunitaire affaibli par la vaccination."
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Pour lui, tout ça est régulé par la 5G : “Celle qu’ils comptent nous injecter (7 vaccins plus terribles les uns que les autres) est une véritable descente aux enfers visant à une dépopulation massive à plus de 80%... joint à ça, la 5G qu’ils installent dans toutes les villes du monde pour affaiblir nos défenses immunitaires."
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Concernant les tests, il affirme "qu'aucun test ne peut détecter le virus Sars-CoV-2. "Mais seulement une infinitude de petits virus inoffensifs ou déchets de cellule qui font naturellement partie de notre microbiote. Les gens testés apparaîtront de plus en plus positifs sur les tests, avoisinant les 90 %."
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Le texte indique que chaque directeur d'établissement scolaire recevra l'obligation de test sans informer les parents. Une fois l'enfant dépisté, tous ses proches le seront également, puis reconfinés et enfin vaccinés. Si la famille refuse, l'enfant serait, selon lui, enlevé, d'après une Ordonnance qui sera envoyé dans les établissements.
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Vérification de l'identité de Jean-Bernard Fourtillan et de ses propos.
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Vérification de l'identité de Paul Héroux et de ses propos.
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Vérification de la signification du terme "COVID-19"
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Vérification de la durée d'activité du coronavirus.
Pistes et conclusions
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Nous avons contacté le ministère de l'Education nationale. Selon le service presse :
« Toutes les personnes symptomatiques ou en contact avec des personnes présentant des symptômes évocateurs du Covid-19 seront testées à partir du 11 mai. Les élèves et personnels entrant dans ces catégories seront testées. En revanche, les autorités sanitaires considèrent que le test virologique ou sérologique des enseignants et des enfants préalablement à la réouverture des écoles et établissements scolaires est inutile.
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Selon les articles de médias traditionnels tels que France 3 Nouvelle Aquitaine, Le Parisien ou encore Capital, Jean-Bernard Fourtillan est un pharmacologue, professeur honoraire de chimie et cofondateur de l'association Fonds Josefa avec sa femme Marianne Fourtillan. Connu pour sa position affirmée contre les vaccins, il a fait l'objet, en septembre 2019, d'une enquête pour avoir mené un essai clinique sauvage sur près 400 membres d'une communauté religieuse de Poitiers, souffrant de la maladie d'Alzheimer et de Parkinson. Une enquête dirigée par l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique. Contacté par le magazine économique Capital, Jean-Bernard Fourtillan "nie être l’auteur de la note sur le coronavirus. Il l’aurait simplement reçue d’un proche, avant de la transférer, à son tour, à “plusieurs amis”. Le pharmacologue assure cependant que son contenu “correspond à la réalité”. “L’objectif de cette fausse pandémie est de vacciner la population mondiale avec un vaccin contre le Covid-19 extrêmement dangereux, qui est le fruit d’une manipulation génétique du Sars-CoV-2”, affirme-t-il".
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Nous l'avons contacté par mail au sujet du document. Il nie être l'auteur sans pour autant réfutés les thèses du document "je suis tout à fait d’accord avec le contenu de cette alerte, qui n’est pas une théorie mais une réalité”.
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Selon le site de l'université McGill, située à Montréal, au Canada, "le Dr Paul Héroux est un scientifique possédant une expérience en physique (BSc, MSc et PhD), en génie (15 ans) et en sciences de la santé (30 ans). Il a commencé sa carrière de chercheur à l'Institut de Recherche d'Hydro-Québec à Varennes, Québec, un laboratoire électrotechnique de renommée internationale. Après avoir complété sa formation par des cours de biologie et de médecine, il s'est intéressé à la santé publique et a été nommé professeur agrégé à la Faculté de médecine de l'Université McGill, où il est l'actuel directeur du programme de santé au travail et également scientifique médical au Département de chirurgie du Centre universitaire de santé McGill." Selon l'entrevue menée par le journaliste Benoit Dutrizac dans l'émission de radio éponyme diffusée sur QUB Radio et rapportée dans le journal de Montréal que le Dr Héroux s'oppose fermement à au déploiement de la 5G. Il "est l’un des 170 scientifiques à avoir signé une lettre adressée à l’ONU appelant les gouvernements à freiner le déploiement de cette technologie puisque peu d’études ont été menées quant à ses effets sur la santé et l’environnement." En ce qui concerne le coronavirus, une nouvelle entrevue a été menée par le même journaliste le 8 mai 2020 durant laquelle il l'interroge sur les possibles liens entre le coronavirus et la 5G. Ce à quoi il répond " Je pense qu'il y a peut-être un lien, mais c'est un lien ténu et on n'a pas de preuves pour utiliser cet argument là. Les arguments qu'on utilise pour écraser la 5G, c'est les arguments de santé basés sur ce qu'on sait des anciennes générations d'ondes électromagnétiques basé sur le réchauffement climatique, que ça va empirer et basé sur l'invasion de la vie privée [...]. Plus tard dans l'interview, il précise pourquoi il évoque des liens ténus en expliquant qu'il base son raisonnement sur les études menées par le professeur Johansson qui montreraient qu'une exposition à long terme aux radiations atténuerait la stimulation du système immunitaire, mais affirme une nouvelle fois que l'argument n'est assez recevable pour lié le coronavirus à la 5G et qu'il dessert.
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Selon des articles de plusieurs médias dont le Huffington Post RTL et Franceinfo c'est lors d'une réunion tenue le 11 février dernier que les experts de l'OMS ont choisi le nom associé au Coronavirus. "Une appellation choisie notamment parce qu’elle est facile à prononcer dans beaucoup de langues. “CO” signifie corona, “VI” virus et “D” a été choisi pour “desease” (maladie en anglais). Le chiffre 19 indique l’année de son apparition (2019)."
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Apparu en janvier dernier, le coronavirus est aujourd'hui toujours présent en France. Dans un article de L'Obs en partenariat avec l'AFP, il est possible de prendre connaissance d'un communiqué publié le 18 mai dernier de la direction générale de la santé faisant le point sur la situation. "L’épidémie de Covid-19 reste active et le virus circule toujours en France. Nous devons donc rester prudents et respecter toutes les mesures barrière, dont le port du masque grand public, lorsque la distance physique minimale d’un mètre ne peut être respectée." Un appel à la prudence accompagné d'un bilan chiffré associé à plusieurs services en premières lignes : "En France, hier, SOS médecins a réalisé 345 interventions pour suspicion de COVID-19, soit 5% de l’activité totale. Les services d’urgence ont noté 351 passages pour ce même motif, soit 1% de l’activité totale."
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25 nouveaux clusters ont été identifiés.